samedi 15 octobre 2016

Nouvelle orthographe : traits d'union et soudure (3/8)

Embarquons avec Bernard pour tout savoir sur la nouvelle orthographe

La nouvelle orthographe (NO pour simplifier) : une série de billets de Bernard Morin, correcteur professionnel, qui s'exprime sur notre blog. Aujourd'hui, il nous parle du trait d'union.
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A – TRAIT D’UNION ET SOUDURE
Dans les mots composés, la tendance générale des « rectifications » en ce qui concerne les mots composés est de les transformer en mots simples.

La N.O. veut donc que soient « soudés » :
  •     les mots composés commençant par contr(e)- et entr(e)-
Pourquoi pas ? Qu’y aurait-il à redire à contrechant, contreculture, contrejour, contrepied, contrepublicité ? À entredeux, (s’)entredéchirer, entrejambe, entretemps ? 
En revanche, contrallée, contramiral, contrattaque, contrespionnage, contrexpertise, contrindication, controffensive me gênent un peu. 
Mais, après tout, il existe bien, dans l’orthographe traditionnelle, contralto, contrescarpe et contrordre, et ça ne me pose pas de problème. Question d’accoutumance ?
  •     les mots composés commençant par extra-, infra-, intra-, ultra-
Cela me paraît une simplification bienvenue. Je remarque toutefois que, pour infra et intra, il n’était pas besoin d’enfoncer la porte déjà bien ouverte : tous leurs composés étaient déjà soudés, sauf ceux qui commencent par une voyell e (intra-artériel, infra-acoustique, etc.). Et c’est là justement que je ne suis plus d’accord avec la NO. Car sont-ils horribles, ces nouveaux intraartériel, intraoculaire ou infraacoustique !
  •     les mots commençant par anti, archi, auto, hypo et hyper, macro et micro, mini, multi, post, socio, télé et tutti quanti. 
Eux aussi étaient déjà presque tous soudés, le trait d’union n’existant que lorsque le deuxième élément du mot commençait par une voyelle : auto-excitation, macro-économie. Et encore, avec archi et anti, il fallait que le second mot commence par un i. On écrivait classiquement archi-important mais archiépiscopal, anti-infectieux mais antialcoolique et antiaérien. Là encore, les rectifications ne changent pas grand-chose, si ce n’est qu’elles avalisent les horribles archiimportant et antiinflammatoire !
  •     les mots constituant des onomatopées (cahincaha, froufrou) ou d’origine étrangère (lockout, ossobuco). 
Là, on aboutit parfois à des graphies bizarres : un apriori, le dalaïlama, un statuquo… Post-scriptum devenant postscriptum, le très classique P.S. deviendra-t-il P. ? 
Notons bien que, en revanche, nota bene (N.B.) ne change pas, inexplicablement. 
Et je ne résiste pas au plaisir de signaler cette bourde des éminents rectificateurs du Conseil supérieur de la langue française : handball devra désormais s’écrire en un mot, disent-ils. Mais, bougres d’ânes, handball, mot allemand, n’a jamais pris de trait d’union !
  •     toute une série de mots auparavant composés 
: croquemonsieur, mangetout, millepatte, portemonnaie, hautparleur… Pourquoi pas ?

Dans les adjectifs numéraux écrits en toutes lettres
On relie systématiquement tous les éléments par des traits d’union (des traits d’union et non des tirets, ce mot désignant une tout autre chose). 
Exemples : 
vingt-et-un-mille-six-cent-deux, 
un-million-cent, 
le quatre-cent-deuxième. 

Il paraît que cela évite d’avoir à apprendre la règle selon laquelle il faut placer un trait d’union entre les dizaines et les unités sauf quand il y a le mot et (cf. les graphies vingt-deux, quatre-vingt-douze, mais trente et un). Admettons…
Là où ça devient comique, c’est quand on nous dit que cela permettra de distinguer :
« quarante-et-un tiers (41/3) de quarante et un tiers (40 + 1/3), 
et aussi 
mille-cent-vingt septièmes (1120/7) de mille-cent vingt-septièmes (1100/27), de mille cent-vingt-septièmes (1000/127), ou encore de mille-cent-vingt-septième (1127e). 
Je suis correcteur professionnel depuis plusieurs dizaines d’années, j’ai corrigé plus de huit cents millions de signes, mais jamais, pas une seule fois, je ne me suis trouvé devant un tel cas de figure ! D’où je conclus que nos rectificateurs se sont plu à résoudre un problème que la vraie vie ne pose jamais.

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